jeudi 6 octobre 2016

Interview de R.J. ELLORY

C'est un véritable honneur de recevoir R.J. ELLORY sur mon "Shoot", merci pour ces très belles réponses, ayant lu "Un coeur sombre" j'en ai eu des frissons, j'espère qu'il en sera de même pour vous.
Un grand merci également à mon amie Sandrine ROY, auteure de Lynwood Miller chez les Editions Lajouanie, pour sa traduction de l'anglais. 







Voilà neuf romans publiés en France, vous y êtes très présent lors de séances de dédicace, on peut dire que c'est un pays que vous affectionnez ou plutôt que ce sont les français qui vous aime ?
J'aime la France. J'aime le pays, les gens, la culture, les lecteurs. Je viendrai vivre ici et j'espère voir ce jour arriver avec grande impatience.
Mes livres sont traduits en 26 langues et pourtant c'est ici, en France, que je vends le plus de livres. Plus que dans n'importe quel autre pays et c'est ici que je reçois l'accueil le plus enthousiaste. Alors, ça a peut-être commencé avec la générosité des Français envers mon travail, mais ça a fini par devenir une histoire d'amour.




Avez-vous le temps de lire Roger? Si oui quelle est votre dernière lecture?
Oui, j'ai le temps de lire. Je suis toujours en train de lire quelque chose. Je lis beaucoup pour mes recherches puisque beaucoup de mes romans contiennent des éléments historiques et des évènements politiques ou culturels marquants.
Mais je lis aussi pour le plaisir quand je voyage. En avançant en âge, je me suis rendu compte que j'étais de plus en plus attiré par les livres de non-fiction plutôt que vers la fiction.
Bien sûr, je lis de la fiction mais rarement ces temps-ci. Je suis fasciné par l'histoire militaire, principalement celle de la Seconde Guerre Mondiale et en ce moment, je lis des livres traitant de l'extraordinaire courage et de la bravoure des résistants français et des opérations spéciales exécutives en France pendant l'invasion en Normandie.
Je suis positivement persuadé que sans les Français, la guerre aurait été perdue. Comme le disait Churchill : la défense française à Dunkerque, qui permit aux Forces Britanniques d'évacuer en Angleterre, non seulement a sauvé plusieurs milliers de vies mais a aussi fait preuve d'un courage plus grand encore que celui des Grecs et des Spartes à Thernopylae.
J'ignore pourquoi, j'ai ressenti une énorme connection avec la France et les Français et j'ai eu l'opportunité de passer du temps dans plus de 50 villes à travers le pays.




Vous avez construit un personnage principal extrêmement fort, avez-vous rencontré des hésitations pendant l'écriture de "Un cœur sombre", sur les événements gravitant autour de lui? A moins d'avoir la fin de l'intrigue en tête en commençant l'écriture...
Non, je ne fais jamais de plan quand j'écris. Je n'ai pas de grandes lignes prédéfinies ni de synopsis quand je commence un livre.
J'ai écrit ce roman parce que je voulais créer un personnage qui soit l'exact opposé de Frank Parrish dans Les anges de New York. Vincent Madigan m'apparaissait presque comme un personnage Shakespearien, une grande figure tragique, un homme qui fait l'expérience d'une révélation concernant ses actes et qui décide de changer le cours de sa vie. Pourtant quoi qu'il fasse, la situation semble aller de mal en pis.
Je voulais qu'il soit torturé, apeuré, désespéré, souffrant d'énormes pressions mentales et émotionnelles mais je voulais aussi qu'il ait conscience d'avoir créé lui-même tous ces événements. Il sait également qu'il est le seul à pouvoir sauver la situation mais il a fait de sa vie une chose tellement compliquée qu'en changer le tracé en serait presque impossible.
Comme dans tous mes romans, une fois que j'ai créé le personnage principal, les événements semblent s'enchaîner de façon quasiment inévitable. Je voulais que le lecteur ressente de l'empathie pour lui, qu'il apprécie le fait qu'il essayait d'arranger les choses mais aussi qu'il comprenne qu'il n'y aurait peut-être pas d'espoir de rédemption.


On voit passer des photos de vous à la guitare avec votre groupe de rock sur les réseaux sociaux, est-ce que la musique et l'écriture sont deux activités bien distinctes pour vous?
Ce sont deux activités différentes mais il y a quelques similitudes.
La différence principale, c'est qu'écrire un livre est une activité individuelle et solitaire alors que faire de la musique, enregistrer des albums, se produire avec un groupe sont des activités collectives. Ecrire une chanson, c'est comme écrire un chapitre.
Ecrire un album c'est comme écrire un livre. Il y a un rythme à tout langage, je pense que je reconnais ces rythmes et que j'ai une approche assez similaire de ces deux passions. Je sais quand ça sonne bien, que ce soit en musique ou en littérature et je sais quand je suis heureux de partager ça avec les autres.




Du coup écrivez-vous en écoutant de la musique ou avez-vous besoin de calme?
Non, j'écris toujours dans le silence. Pour moi, l'écriture demande une concentration intense.
J'écris plusieurs heures par jour, et j'essaie d'achever un roman en 10 ou 12 semaines environ.
C'est ce qui semble fonctionner le mieux pour moi et j'aime bien être capable de me concentrer sans aucune distraction extérieure.




Vincent est un être particulier, qui interpelle, comment est-il né dans votre esprit, quelles ont été vos inspirations pour créer un homme pareil?
Avec des mots simples, il s'agissait de créer une antithèse de ce que l'on considère comme un héros.
Je voulais faire en sorte que le lecteur ressente empathie et sympathie pour cet être humain terrible, au point même qu'il veuille sa victoire finale.
De cette façon, il est un peu comme Ernesto Perez dans Vandetta. Comme dans tous mes livres, le personnage central est souvent plein de défauts. J'aime à penser qu'ils sont très humains en fait.
Je commence avec ce désir de créer un effet mental et émotionnel sur le lecteur et ensuite je réfléchis au genre de personnage qui va faire passer cette émotion.
A partir de là se définit leur nature, leur personnalité, leurs relations, même leur métier et c'est à partir de ça que je construis l'histoire autour d'eux.
L'intrigue peut souvent changer en fonction de ma meilleure compréhension des personnages dont j'écris l'histoire.
En ce qui concerne Madigan, exactement comme Frank Parrish dans Les anges de New York ou Ernesto Perez dans Vendetta, nous avons un personnage qui a des défauts, qui est brisé et qui se bat pour donner du sens à sa vie.
Je pense que c'est quelque chose qui m'interpelle grandement. Je veux écrire sur des gens qui sont prisonniers d'un monde où ils doivent se battre pour se comprendre eux-mêmes et prendre les meilleures décisions, quelles que soient les situations qu'ils ont à résoudre.





Quel conseil donneriez-vous à un jeune auteur qui débute l'écriture de son manuscrit?
Je crois que le plus mauvais livre que l'on puisse écrire, est celui que l'on est persuadé que les gens aimeront.
Je crois que le meilleur livre que l'on puisse écrire, c'est celui que l'on aimerait lire soi-même.
Ecrivez le livre qui éveillera votre intérêt. Votre enthousiasme pour le sujet transparaîtra et cet enthousiasme sera alors contagieux.
Personnellement, je suis parfois davantage captivé par le langage utilisé que par l'histoire en elle-même.
Je lis des livres assez pauvres en matière de trame mais le style dans lequel ils sont écrits est si beau et si évocateur que je lis de façon compulsive, m'obligeant souvent à ralentir pour ne pas être à court de lecture trop vite!
Je pense que le succès de beaucoup de livres extraordinaires n'est pas dû aux idées couchées sur le papier mais plutôt à la façon dont ils ont été écrits ou construits et ça fonctionne magnifiquement.
Je pense que les grandes histoires viennent des gens et de leur expérience de la vie.



Ceci n'est pas une question, dites-nous tout ce que vous avez envie de faire passer à propos de "Un cœur sombre".
Je voulais simplement écrire un roman qui donne le sentiment au lecteur, qu'il avait vécu deux semaines en enfer avec Vincent Madigan.
Je voulais une atmosphère tendue et pleine de gêne, émotionnellement exigeante pour que le lecteur ait envie qu'il s'en sorte tout en se disant en même temps que peut-être, il y avait une chance qu'il y arrive.
Les titres des chapitres sont tous des chansons écrites et enregistrées par un groupe (the Gun Club).
Il n'y a pas de relation avec l'histoire en elle-même mais il y a quelque chose dans la musique de ce groupe que j'aime, qui a un rapport avec la colère et la tension, la férocité de celui-ci, l'idée du danger et le malaise qui l'accompagne.
Je voulais que ce livre soit comme un tour de montagnes russes, où l'on se sent mal mais dont on ne peut pas descendre avant la fin.





N'hésitez pas à revenir chez moi, 
vous êtes le bienvenu Roger.


mercredi 5 octobre 2016

Kabukicho de Dominique SYLVAIN




   


Dominique SYLVAIN

Kabukicho



Sortie le 
6 octobre 2016












4ème de couverture :
À la nuit tombée, Kabukicho, sous les néons, devient le quartier le plus sulfureux de la capitale nipponne. Au cœur de ce théâtre, les faux-semblants sont rois, et l’art de séduire se paye à coup de gros billets et de coupes de champagne. Deux personnalités dominent la scène : le très élégant Yudai, dont les clientes goûtent la distinction et l’oreille attentive, et Kate Sanders, l’Anglaise fascinante, la plus recherchée des hôtesses du Club Gaïa, l’un des derniers lieux où les fidèles apprécient plus le charme et l’exquise compagnie féminine que les plaisirs charnels. 

Pourtant, sans prévenir, la jeune femme disparaît. Le piège de Kabukicho s’est-il refermé ? À Londres, son père reçoit sur son téléphone portable une photo oùelle apparaît, les yeux clos, suivie de ce message : « Elle dort ici. » Bouleversé, mais déterminé à retrouver sa fille, Sanders prend le premier avion pour Tokyo, où Marie, colocataire et amie de Kate, l’aidera dans sa recherche. Yamada, l’imperturbable capitaine de police du quartier de Shinjuku, mènera quant à lui l’enquête officielle. 

Entre mensonges et pseudo-vérités, il sera difficile de démêler les fils d’une manipulation démoniaque ; pour le plus grand plaisir du lecteur.






Il faut savoir que je voyage dans ma vie privée bien sûr mais aussi à travers mes lectures et je suis très enthousiaste de partir au Japon cette fois-ci.
C'est un endroit rarement visité par les auteurs, en même temps il est extrêmement difficile de l'aborder si on ne connait pas le pays.
Et ça tombe bien je vois que l'auteure y a longtemps vécu.

Marie est hôtesse dans un club nocturne de Kabukicho au Japon.
En rentrant au petit matin elle reçoit un appel du père de Kate, sa colocataire.
Il est dans un état d'affolement terrible, en effet il a reçu une photo de sa fille, allongée par terre, les yeux fermés et une mention manuscrite dessous.
Marie va suivre les instructions de ce père terrifié par la disparition de sa fille et de son probable kidnapping.
Une enquête est immédiatement ouverte au commissariat et les soupçons vont très vite se porter sur un ami de la jeune femme...

Le contraste des personnalités des deux amies est intéressant, l'une est effacée et sans charme particulier quand la deuxième est jolie et populaire.

Les émotions transparaissent à profusion, j'ai senti le désarrois des personnages mais aussi la colère et la souffrance.
Pas que ce soit jubilatoire, loin de là mais c'est vivant, j'aime ressentir et voir à travers les lignes.
D'ailleurs j'ai trouvé ce roman assez visuel, j'ai pu voir presque comme dans un film et j'ai aimé ça.

J'étais effectivement assez curieuse de voir ce que pouvait donner le roman d'une française à la sauce japonaise et le dépaysement a été au rendez-vous.
L'ambiance créée est fabuleuse, j'ai pu sentir la fumée à l'intérieur des bars et c'est un pays tellement différent avec des coutumes et des procédés à l'opposé des nôtres, c'est je pense fidèlement reproduit. 

J'ai aimé la complexité du fonctionnement des clubs nippons, la frontière est parfois mince entre hôtesse, dame de compagnie et prostitué.
Ça m'intrigue énormément je dois l'avouer.

J'ai avancé ma lecture avec des tonnes de question sur le sort de Kate et j'ai parfois ouvert mes yeux en très grand pour être sûre de ce que je lisais. 
Je ne dirais pas un mot de plus même sous la torture, je peux juste dire que c'est une très belle découverte littéraire, j'en suis ravie.



Dominique Sylvain a été journaliste indépendante pour "Le Journal du Dimanche," puis journaliste d'entreprise et responsable du mécénat dans la sidérurgie (groupe Usinor).
Pendant douze ans, elle a vécu avec sa famille en Asie. Ainsi, Tokyo, où elle a passé dix ans, lui a inspiré son premier roman Baka ! (1995). Sœurs de sang et Travestis (1997 et 1998) ont été écrits à Singapour.
Elle a reçu le Prix Sang d'Encre en 2000 pour Vox, le prix Michel Lebrun en 2001 pour Strad, le Grand prix des lectrices de Elle 2005 pour Passage du Désir et le prix du meilleur polar du magazine LIRE pour Guerre sale en 2011. 
Ses quinze romans ont tous été publiés dans la collection Chemins Nocturnes, aux Éditions Viviane Hamy. 





mardi 4 octobre 2016

Dusk de Sébastien BOUCHERY










Sébastien BOUCHERY

Dusk


















4ème de couverture : 
Nebraska, 19ème siècle. De redoutables limiers partent affronter l'hiver glacial pour neutraliser l'assassin d'une fillette. Mais ils devront, tour à tour, affronter leurs passés tumultueux, ainsi qu'un second prédateur... Un tueur en série qui laisse, dans son sillage, un nombre inquiétant de cadavres... 

Jouant avec les codes des thrillers actuels, Sebastien Bouchery revisite l'univers du western avec des personnages hauts en couleur et une intrigue aussi riche que palpitante.




J'ai eu l'impression de plonger dans l'ambiance d'Huckleberry Finn mais en version adulte, même si les lieux et les circonstances sont différents.

Garett apprécie les moments où s'arrêtent les corvées de la ferme, il peut profiter des plaisirs simples de la vie comme la pêche par exemple.
Sa ligne s'étant coincée dans le lac, il décide d'aller la dégager malgré le courant.
Il va dégager le corps d'une fillette et des mesures vont être prises immédiatement par le futur gouverneur démocrate de l'Etat de Nebraska.
Une équipe de pisteurs va partir sur les traces du tueur...

Les bases sont posées avec les valeurs de l'Amérique profonde du 19ème siècle, le charmes de ses comtés, les familles unies dans des croyances ancestrales.
Les dimanches à l'église, la reprise de la ferme familiale, le départ à la guerre de l’aîné de la fratrie ou encore les mariages arrangés.
Très vite le récit s'oriente vers une traque dangereuse, un périple semé d’embûches où il va falloir supporter un confort plus que rudimentaire.
J'ai apprécié les touches de chaleur posées çà et là dans cette époque rude, quelles soient réchauffées par l’alcool ou par les corps.

Le personnage de Jane est terriblement réjouissant, cette femme qui se montre l'égale de l'homme, capable de passer des journées à cheval et de dormir à même le sol dans le froid.
C'est exactement ce qu'il fallait pour pimenter un roman à la testostérone.

J'ai beaucoup aimé l'action, les rebondissements où certains dégainent plus vite que leur ombre.
J'ai trouvé le soupçon de cruauté qu'il faut pour faire un bon bouquin et celui-ci est excellent.
La fin est superbe, en grande partie inattendue et bienvenue pour terminer bouche bée.




Né en1975 dans le département de la Loire, Sébastien Bouchery est fonctionnaire de métier mais aussi scénariste, réalisateur de courts-métrages et de publicités. Son premier roman est paru en 2008. Depuis, douze autres livres ont vu le jour, avec le thriller comme genre de prédilection. On lui doit notamment « Nos sanglantes confessions » chez Eastern, « Ma vie avec la mort » et « Monnaie d'échange » chez Nouvelles Plumes.